La domination chinoise sur les terres rares : un défi pour l’innovation européenne.

L’interdiction des exportations de terres rares par la Chine aux Etats-Unis a résonné comme un signal d’alarme en Europe. Cela l’oblige à réfléchir à des alternatives aux terres rares.

Extraction de métaux rares sur une exploitation Chinoise – Shutterstock

La monopolisation des terres rares par la Chine

En 2021, la Commission européenne avait déclaré que 98 % des terres rares utilisées dans l’Union Européenne étaient importées de Chine. Les terres rares ou “métaux rares” sont présentes dans toutes les technologies modernes : batteries, écrans, éoliennes, missiles. En bref, il est impossible d’imaginer le monde de demain sans elles. La Chine est le premier producteur de terres rares au monde en détenant 80% du marché mondial. En effet, sur son territoire il y a une concentration de ces métaux rares, qui permette la rentabilité des mines déjà ouvertes, contrairement à d’autres pays comme les Etats-Unis qui détiennent également ces métaux rares mais de façon moins concentrée. L’ouverture de mines hors du territoire Chinois est donc moins rentable puisque cela présente des coûts de productions et d’extractions importants. L’Europe et presque tous les pays du monde sont donc dépendants de la Chine. 

Le 3 Décembre dernier, la Chine a d’ailleurs annoncé l’interdiction d’exportation de ces métaux rares vers les Etats-Unis. Une réponse directe aux déclarations de Donald Trump qui prévoit l’augmentation des frais douaniers pour tous les produits en provenance de Chine. 

Des alternatives Européennes

Pour lutter contre le monopole Chinois des terres rares, l’Europe cherche quant à elle à produire des technologies sans ces métaux rares. Dominique Viel, présidente du groupe d’experts sur les ressources minérales de la transition bas carbone, préconise le passage aux technologies de supraconduction. Elle donne pour exemple l’utilisation de cette technologie pour la construction d’éoliennes marines, ce qui réduirait voire supprimerait la dépendance aux terres rares. 

En 2018, l’entreprise française Jeumont Electric, investit avec huit partenaires européens, dans la première machine utilisant la supraconductivité dans les génératrices de turbines éoliennes, pour être testée avant d’être exploitée sur une éolienne au Danemark.

D’autres solutions existent pour sortir de cette dépendance chinoise : recyclage des métaux rares, notamment des aimants permanents et pourquoi pas l’investissement d’exploitations minières de terres rares dans l’Arctique européen. Ces stratégies permettraient de retrouver une part de souveraineté si elles étaient toutes les trois menées à leur terme, et pas seulement l’une ou l’autre. 

Vers un monde sans terres rares ? 

Guillaume Pitron, journaliste français, spécialiste de la géopolitique des matières premières à enquêté pendant près de 6 ans sur l’exploitation des métaux rares. Ces recherches démontrent l’impasse dans laquelle s’engouffrent les politiques de la transition énergétique. 

En effet les accords de la Cop21 incitaient à développer les « énergies vertes » afin de lutter contre le réchauffement climatique. Cette orientation, qui semble parfaitement sensée au premier abord : les panneaux photovoltaïques ou les véhicules électriques n’émettent pas de C02 lorsqu’ils sont en fonctionnement, fait l’impasse sur le coût environnemental de leur production. Que ce soit en termes de pollution des sols, de l’eau et des rejets des gaz à effet de serre des engins extracteurs, la production des énergies dites « vertes », avec ses mines de terres rares, est pire que celle du pétrole. 

La dépendance des pays importateurs envers les métaux rares avec la Chine est en réalité beaucoup plus importante que celle du pétrole avec l’OPEP*. Mais alors, comment espérer basculer le monde vers le tout numérique et les énergies dites « renouvelables » dans ces conditions ? Guillaume Pitron ne croit pas que cela soit possible, puisque pour lui, la limite commence déjà à être atteinte. La seule solution est un changement dans le modèle économique, ce que le journaliste résume par la phrase suivante : « Si nous n’allons pas vers une consommation sobre, nous continuerons indéfiniment de déplacer le problème« . 

*Organisation des pays exportateurs de pétrole

Gwennan LE MOIGNE

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